Le journalisme et le doute

Le journalisme et le doute

Le journaliste français Jean-Claude Jaillette vient de publier un livre intitulé "Sauvez les OGM". Le fait est suffisamment rare, d'un intellectuel français prenant sa plume pour rétablir certaines vérités au delà de la propagande et du politiquement correct pour que nous y consacrions un article de blog. L'excellente émission de la RSR Médialogues avait d'ailleurs parlé de ce sujet, le 14 mai dernier.

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La situation de Jean-Claude Jaillette est tout à fait remarquable. Jaillette est en effet connu en France pour être l'un des journalistes à l'origine de la campagne de refus et de dénigrement des OGM. Journaliste à Libération, il a été en responsable en novembre 1996 de l'article de intitulé « Alerte au soja fou », que d’aucuns considèrent comme le lancement en France du lynchage médiatique des OGM.

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Jaillette reconnaît aujourd'hui que la problématique de la technologie transgénique est minée par l'idéologie. Toute la réflexion sur le sujet a quitté le terrain du débat rationnel et démocratique pour entrer dans une polémique idéologique se situant dans un milieu strictement politique. Pour l’auteur, il faut "sauver" les OGM car ils sont indispensables à une agriculture durable. L’auteur rappelle cruellement qu’« autour de la France barricadée » (il aurait pu ajouter presque toute l'Europe et la Suisse) , la recherche continue : Monsanto investit 2 millions de dollars par jour dans ses programmes, alors que le gouvernement français annonce un hypothétique et imprécis plan de 45 millions d’euros… sur 3 ans; sans parler de Syngenta, Bayer et autres.
Pourquoi l’activisme de Greenpeace contre les OGM est-il quasi absent aux États-Unis (là où se concentrent 50 % des cultures OGM) et si virulent en Europe (où la culture des OGM est marginale) ? Réponse de l’auteur : une affaire de gros sous pour l’organisation « toujours à la recherche des meilleurs créneaux pour drainer des contributions financières ». De nombreuses ONG ont d'ailleurs fait du slogan "non aux OGM" leur slogan favori (sans grand risque pour elles-même et au mépris des intérêts des agriculteurs).
En passant Jaillette dénonce l'imposture de certain de ces confrères et consœurs, qui sans s'embarrasser de nuances montent tous de le train anti-OGM avec des articles et documentaires partial et résolument partisans et avec la complicités de certaines chaînes télévisions et autres médias à la recherche d'audience, qui préfèrent diffuser un documentaire anti-OGM plutôt qu'un reportage sérieux sur le sujet.
« La religion anti-OGM a besoin de martyrs »; J.-C. Jaillette déconstruit, preuves à l'appui, l'histoire soigneusement arrangée de l’agriculteur canadien Percy Schmeiser (attaqué en justice par Monsanto pour avoir cultivé clandestinement du colza OGM) et le mythe des chercheurs maudits soit-disant privés de crédits parce qu'ils ont publié des résultats critiques.
Le vent tourne, le doute s'installe dans les milieux du journalisme; certains commencent à réaliser la manipulation dont ils ont été et sont encore l'objet de la part de certains milieux environnementalistes et tiers-mondistes. Le succès des plantes transgéniques hors d'Europe et tout à fait remarquable. Sauf à considérer les paysans américains, africains & indiens comme de pauvres types incompétents, victimes d'une conspiration économique cynique dirigé depuis St Louis (USA) il convient maintenant de réaliser qu'ils ont peut-être des arguments valables pour avoir fait ce choix. Ce choix sera-t-il bientôt offert aux agriculteurs européens (et suisses)? La recherche agronomique publique sera-t-elle vraiment encouragée? Questions pour le moment sans réponses.

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