Greenpeace & Monsanto: même combat

La recherche fondamentale et appliquée à l'agriculture est en danger. Le développement de nouveaux OGM est compromis. Ce ne sont pas les quelques millions de francs ou d'euros proposés en guise d'édulcorants pour faire passer des moratoires constitutionnels ou institutionnels envers les OGM qui vont y changer grand chose. Les politiques ont décidé que l'on ne pouvait par faire confiance aux scientifiques et qu'il fallait les remettre à l'ordre. Que notre agriculture soit non concurrentielle, qu'elle utilise des pesticides dont nous pourrions nous passer, qu'importe; les subventions et quelques beaux discours sur le principe de précaution suffisent pour calmer le jeu. En Europe, tous les programmes d'essais en champs sont pratiquement arrêtés (84 propositions seulement pour 2008) et aucun projet de développement d'OGM dans les Université et Centres de recherche agronomiques ne se concrétise réellement. Comment en sommes-nous arrivé là? Deux raisons au moins peuvent être invoquées:

  1. La plus ancienne, qui date des années 1980 a été la prise en main par l'industrie semencière et agroalimentaire de tout le système de mise sur le marché des nouvelles semences et le désengagement progressif des gouvernements dans la recherche agronomique publique (qui s'est manifesté en Suisse par le trop fameux "Personalstop" et la disparitions de groupes de recherche). Le système des brevets a été modifié pour permettre la mise sous contrôle de toutes les étapes de production d'une plante OGM. Le principe même des obtentions végétales a été adapté en conséquence. Pour rendre accessible aux paysans des pays en voie de développement le fameux "riz doré" enrichi en vitamine A ce ne sont pas moins d'une centaine de brevets qui ont du être négociés pour obtenir en fin de compte la gratuité pour les agriculteurs dont le revenu annuel est inférieur à 10'000$.
  2. La plus récente, qui s'est manifestée dès les années 1990 surtout, a été l'opposition de principe des organisations écologiques envers toute culture d'OGM. Cette opposition a abouti à la mise en place de lois et de règles extrêmement complexes, toutes en défaveurs des OGM considérés comme des agents dangereux, "polluants" et donc indésirables. Lorsque les organisations comme le WWF ont pu s'infiltrer dans les organes gouvernementaux les effets ont été désastreux. Le blocage par le directeur de l'OFEFP, Philippe Roch (ancien cadre du WWF) des essais en champs de la Station agronomiques fédérale de Changins nécessaires au développement d'une pomme-de-terre résistante au mildiou, a tué pratiquement toutes les tentatives d'essais de plantes OGM en Suisse et compromis la recherche publique dans ce secteur.

Aujourd'hui, seules les grandes compagnies comme Syngenta, Bayer, Monsanto et leurs filiales peuvent se permettre d'effectuer les démarches nécessaires pour entreprendre des essais en champs et pour ensuite mettre sur le marché une semence transgénique. Elles seules peuvent affronter Greenpeace, le WWF et autres multinationales écologiques et leurs stratégies d'opposition systématique et assumer les frais imposées par la législation. Dans le domaine publique, les sciences agronomiques suisse et européenne sont donc, pour le moment au moins, condamnées à l'inaction. Il y a beaucoup de plantes dans les laboratoires, il y a beaucoup de savoir faire et de connaissance qui sont aujourd'hui négligés.
Cependant, les pays du tiers-monde sont ceux qui souffrent le plus de cette situation, empêchés qu'ils sont de gérer eux-même et de maîtriser le développement de leur agriculture par le biais des OGM. A ce sujet, on lira avec intérêt les références suivantes [1] & [2]

Bibliography
1. Volume 2 - Issue 1/2 - 2006 - International Journal of Technology and Globalisation (IJTG), Special Issue on Genetically Modified Crops in Developing Countries – Institutional and Policy Challenges Guest Editor: Sakiko Fukuda-Parr
2. S. Fukuda-Sparr, ed., The Gene Revolution: GM Crops and Unequal Development. London: Earthscan, 2007, xxx + 248 pp., ISBN 978-1-84407-409-9.
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